Compter, dénombrer

On imagine aisément les circonstances qui ont conduit les hommes, au cours de la préhistoire, à pratiquer le dénombrement: compter ses moutons, le nombre de jours écoulés, d'ennemis, de pierres taillées, d'habitations à construire, ...

Nous-mêmes comptons si spontanément que nous oublions la difficulté d'en établir la méthode. La définition des nombres (ou, plus savamment, d'un système de numération) ne s'est pas faite en un jour, et aujourd'hui encore coexistent plusieurs systèmes adaptés à différents usages.

La base d'une numération

Commençons par compter de petits nombres d'objets. Disposons-nous d'un mot particulier pour chaque nombre? Un, deux, trois, ..., dix, onze, ... quinze, seize. Réponse: oui, jusque seize. Au-delà, il s'agit de mots composés des noms de nombres plus petits: dix-sept, dix-huit, ... Sauf pour les noms de dizaines de vingt à soixante, et pour les nombres cent, mille, million, milliard.

Dans une langue au moins - le hindi - il existe un mot particulier, non composé, pour désigner chaque nombre de zéro à cent (voir ICI). On se rend vite compte que la mémorisation de tous ces mots est fort malaisée. Une méthode simplifiée est nécessaire: grouper les objets par paquets égaux, puis compter le nombre de paquets, voilà qui apparaît pratique. Si tout le monde est d'accord sur la dimension à donner aux paquets, on dispose d'un système de numération.

La dimension dix s'est aujourd'hui imposée de manière universelle: c'est le système décimal. On dit que sa base est dix. Il a existé d'autres systèmes. Dans ma jeunesse, on comptait les oeufs - et aussi les poussins - par douzaines, et l'on parlait de demi-douzaines (aujourd'hui encore, les oeufs se vendent souvent en boîtes de six).

On trouvera ICI un inventaire des bases de numération les plus connues.

Comme on le sait, lorsque l'on compte les paquets de dix, et que l'on dépasse neuf paquets, on commence à compter les paquets de (dix) paquets - que l'on appelle centaines - et lorsqu'on dépasse neuf paquets de dix paquets, on commence à compter en paquets de (dix) paquets de (dix) paquets - que l'on appelle milliers -, si bien que le nombre 3726 représente
....... trois paquets de mille
plus sept paquets de cent
plus deux paquets de dix
plus six

La pratique de toutes nos opérations de calcul (addition, soustraction, ...) a été adaptée au système décimal.

Le zéro

Tant que l'on compte sur les doigts de la main, on peut dire "aucun" ou "rien" pour désigner l'absence d'objet. Dès que l'on compte par paquets, le zéro est indispensable, puisque l'on doit pouvoir écrire par exemple 704: il y a sept paquets de cent, plus quatre unités, mais zéro paquets de dix.

Paquets et puissances

On remarquera, pour la base dix, que
cent = dix paquets de 10 = 102
mille = dix paquets de (dix) paquets de dix = 103

Plus généralement, dans un système de base N, un nombre composé, de droite à gauche, des chiffres x0 , x1, x2, ..., xn doit se comprendre comme
...... x0 fois N0 (N exposant zéro) (rappelons que, quel que soit N, N0 = 1)
plus x1 fois N1
plus x2 fois N2
....
plus xn fois Nn

Ainsi, dans le système décimal, le nombre 3726 équivant à
6 fois 100 + 2 fois 101 + 7 fois 102 + 3 fois 103

Parlons un peu du système binaire

Outre qu'il est adapté à notre corps (les dix doigts de la main), le système décimal permet d'écrire des nombres assez grands de manière relativement compacte et lisible.

Il n'en est pas de même pour le système binaire (de base deux), qui ne dispose que de deux chiffres: 0 et 1. Conformément à la méthode d'écriture expliquée ci-dessus, le nombre

1 0 1 0 0 1 1

doit se comprendre comme étant (de droite à gauche)

  1 fois 20 = 1 x 1 = 1
plus 1 fois 21 =

1 x 2

= 2
plus 0 fois 22 = 0 x 4 = 0
plus 0 fois 23 = 0 x 8 = 0
plus 1 fois 24 = 1 x 16 = 16
plus 0 fois 25 = 0 x 32 = 0
plus 1 fois 26 = 1 x 64 = 64
soit au total 83 dans le système décimal

Peu pratique pour l'homme, le système binaire est indispensable aux ordinateurs, dont les composants électroniques élémentaires ne peuvent prendre en considération que deux possibilités: OUI (p.ex. chargé) ou NON (p.ex. non chargé), auxquelles nous donnons la signification 1 ou 0: c'est ce que l'on appelle un "bit" d'information.

Lorsque l'homme veut réfléchir dans un langage proche de la machine, il compte parfois par groupes de quatre bits, ce qui lui permet d'utiliser des "chiffres" de zéro à 15, en utilisant les symboles suivants:

0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, A (pour 10), B(11), C(12), D(13), E(14), F(15)

Dans ce système (appelé hexadécimal), le nombre 3E a comme équivalent en décimal

E (= 14) fois 160 = 14 x 1 = 14,
plus 3 fois 161 = 3 fois 16 = 48,
soit au total 62

Il correspond en binaire à 0 0 1 1 1 1 1 0

 
Remarquons au passage qu'un système de numération ne peut fonctionner que s'il n'existe qu'une seule façon d'écrire un nombre donné. Cela nous semble évident dans le système décimal. Ce l'est tout autant avec toute autre base.